J'ai d'abord songé à ne pas en parler sur le blog. Parce que je ne veux effrayer personne, et parce que je ne veux pas que les gens se fassent trop de soucis pour moi, ou viennent à penser que tout les japonais sont comme ça.

J'ai ensuite pensé à ne l'envoyer que par mail à mes proches, ce que j'ai fait. Et puis finalement, je me suis dit qu'il fallait que j'en parle, même aux gens que je ne connais pas.

 

Je ne veux en aucun cas faire un portrait négatif du Japon, qui est et restera un pays fantastique, car cela aurait pu se produire n'importe où ailleurs.

 

J'ai beaucoup hésité.

 

Tout d'abord, parce que même si au final il n'est rien arrivé de grave et que je vais trés bien, cela fait partie de mon voyage et de mes aventures. Ensuite parce que même si je suis quelqu'un de TRES chanceux, il m'arrive aussi des déboires, et pour l'équilibre mental de mes lecteurs, il est important de ne pas trop les submerger de bonheur en barre. Et enfin, parce qu'il ne faut surtout pas taire ce genre de choses, cela ne peut que permettre au phénomène de se reproduire.

 

 

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Voici le texte sous forme de lettre que j'ai écris à ma famille :

 

 

 

"Mon cher petit chat qui louche.

Je t’écris à toi parce que tu me manque, et que je sais que tu seras toujours là pour m’écouter.

 

J’étais heureuse parce que j’avais trouvé un travail si vite. On m’a embauché pour faire du travail de vérification et de remplacement de boites à pharmacie en entreprise, et finalement, je me suis retrouvée à faire du travail de bureau. Payée 10 euros de l’heure, un mois de période d’essais avant de devenir employée, payée 12 euros, et peut-être une possibilité de changer mon visa. J’étais aux anges.

 

Le premier jour, j’ai vérifié des données sur Excel, et puis j’ai fait une ou deux livraisons de courrier en vélo. Il faisait beau, je pédalais de toutes mes forces, je souriais. Pour m’encourager, mon patron m’a invitée au restaurant.

 

Le deuxième jour,  j’ai revérifié le même dossier avec d’autres critères. Mais je m’en fichais, ça me plaisait. Et puis à 6 heures du soir, mon patron m’a demandé de prendre en charge les 5 personnes qui venaient le lendemain matin passer un entretien d’embauche en son absence. J’ai eu beau lui dire que je n’étais absolument pas qualifiée pour ça, il s'et énervé et m’a fait répéter un texte jusqu’à 10 heures du soir en me traitant de tous les noms. Que je ne valais pas mieux qu’une collégienne, que mon japonais était incompréhensible, que j’étais inutile, que je ne pouvais lui servir à rien dans cette entreprise. Pourtant le soir d’avant, je lui avais déjà dit que je n’étais une foudre de guerre, j’avais été sincère. Pourquoi s’énervait-il maintenant ? Je suis rentrée déprimée. Et puis je me suis dit que c’était certainement un test pour voir de quoi j’étais capable sous le pression, et que je lui prouverais que je pouvais apprendre.

 

Le troisième jour, connaissant mon texte par cœur, je suis arrivée au bureau fière de moi. Il m’a tendue une feuille en me disant que je n’avais qu’à la donner aux personnes et que je n’avais besoin de rien dire, seulement d’appeler son portable pour qu’il fasse l’entretient au téléphone. Simplement, la première personne arrivée, il ne répondit pas. Je me débrouillais tant bien que mal avec mon langage courant et le peu de formule de politesse que je connaissais, pour ne pas décrédibiliser l’entreprise. Au retour de mon bourreau à 13h30 de l’après-midi, je ne me vis octroyer en récompense que 40 minutes de pause pour manger. Ce sur quoi il renchérit, que le temps c’était de l’argent, qu’il attendait de moi que je m’investisse à 100%  dans le travail,  et que par conséquent, travailler tous les jours jusqu’à 10 ou 11 heures du soir était normal, sans heures supplémentaire payées bien sûr. Je me dis que je travaillerais 12 heures par jour pendant deux semaines, le temps de gagner de quoi payer mon loyer du mois, et que j’abandonnerais ensuite.

 

Me répétant toujours que j’étais bonne à rien, ni à répondre au téléphone, ni à vendre des vêtements, ni à jouer les chauffeurs, ni à travailler au bureau, il me dit que j’aurai peut-être une chance si je travaillais dans la branche « service » de l’entreprise, dans le magasin de massages. L’idée me parut saugrenue, mais je me dis alors que sans essayer on ne savait pas. Le soir même à 20 heures, il me conduisit au magasin ou je devais faire un essai. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je me suis retrouvée dans son appartement, m’entendant dire que l’essai je devais le faire sur lui !

 

Je me suis enfuie.

 

J’ai couru longtemps, persuadée qu’il était à mes trousses. Et puis je suis rentrée dans un magasin de ramens, dont la lumière forte m’a rassurée. - Où-suis-je ? Ai-je demandé. - Dans la ville de Seto au nord de Nagoya m’a répondu le vendeur. - Ca vous dérange si je m’arrête un instant dans un coin du restaurant ? – Non pas du tout, reposez-vous.

Je me suis assise dans un coin, ai fondu en larmes.

 

J’ai pleuré longtemps. Je ne pensais pas avoir eu aussi peur alors que rien de grave ne s'était passé.

 

Et puis lorsque je me suis calmée, enfin, j’ai eu besoin de parler. J’avais peur. Je voulu appeler Seiji pour qu’il vienne me chercher en voiture. Mais au final, je n’ai pas osé. Le vendeur pris sa pause pour me raccompagner en voiture jusqu’à la gare la plus proche.

 

Dans le train, j’envoyais un message à une des jeunes filles de l’entretien avec qui le courant était vraiment bien passé pour la mettre en garde.

 

Rentrée à l’appartement, j’ai enfin pu parler avec Seiji, Kazuma, Rie et Mariko qui m’ont réconfortée et offert  du chocolat en regardant Lara Croft  parler le japonais.

 

Aujourd’hui je ne suis pas allée au travail. J’attends un coup de fil de mon patron pour lui dire qu e j’arrête et lui raccrocher au nez. Et puis je lui écrirais un mail intitulé « time is money » où je lui demanderais les 220 euros qu’il me doit pour trois jours de travail en lui faisait cadeau de heures supplémentaires.

 

Je t’embrasse fort mon Perceval, j’aurai aimé que tu sois là pour sécher mes larmes et ronronner dans mon cou pour que je m’endorme.

 

Tu me manques."

 

 

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Je veux vous remercier, car les témoignages de compation et d'amitié ont afflués de tout côtés et cela m'a vraiment fait du bien. J'ai surtout eu une grossse frayeur, qui a disparut après une soirée de rigolade, une bonne nuit de sommeil, et une balade en forêt.

 

Je veux aussi préciser pour ceux et celles qui s'indigneraient, qu'en l'absence de preuves et de fait tangibles, il n'y a rien qui puisse être fait. Et qu'ici, cela m'apporterais certainement plus de problèmes que de solutions. Je me suis contentée de prévenir les jeunes filles à qui j'ai fait l'entretient, ainsi que l'hotesse d'acceuil du bâtiment. J'ai aussi demandé à être payée pour les trois jours pour lesquels j'ai travaillé, puisque le contrat de travail avait été signé.

 

Donc aujourd'hui, tout va trés bien,

je suis de nouveau en recherche active d'un emplois.

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