/!\ Certaines images et/ou propos de cet article pouvant faire découvrir un monde insoupçonné à un trop jeune lectorat, veuillez tenir vos enfants loin de la suite du texte. 

 

naked man festival japan

Il est d'avis populaire que les japonais sont des gens prudes et timides, dans un pays où l'on ne s'exhibe pas en public, et ou la moindre épaule dénudée dans un métro déchaine la passion d'hommes d'affaires en costumes gris.

C'est faux. Et vrai à la fois. Il ne s'agit que d'un problème de contexte.

 

Comme je vous l'ai dit précédemment, il est normal pour les membres d'une même famille de prendre le bain ensemble. Tout comme il est normal d'aller se baigner en habit d'Eve aux sources chaudes qui sont parfois mixtes. Les filles portent des jupes ultra-courtes, mais elles ne découvrent pratiquement jamais leurs épaules ou leur décolleté. Culture, pure et simple. Mais si le nippon déifie et vénère le corps de la femme, il n'en est pas tout-à-fait de même concernant le sien.

Les programmes télévisés regorgent de personnages plus ou moins dénudés. Ce qui en France serait jugé comme de irrespectueux et un manque de savoir-vivre certain, est vu ici comme parfaitement hilarant. Car le japonais aime montrer son derrière.

 

 

 

Le 22 février, j'ai rendez-vous à Konomiya, à 15 km au Nord-Ouest de Nagoya, pour assister à un Hadaka Matsuri : Un festival de l'homme nu.

Autant dire qu'avec les 4°C, le temps nuageux et le vent prévus pour la journée, l'idée me réchauffe d'avance.

 

Je retrouve mes amis de l'English school of travellers, à la Gare de Nagoya vers 10h en sortant un peu plus tôt de mon boulot, et nous prenons le train. La ligne de métro semble prête à accueillir foule. L'effectif d'agents de gare à triplé, et un tarif spécial pour la journée est disponible sur des points de ventes éphémère.

La gare d'arrivée est bondée et le train se vide d'un seul coup. Mais notre groupe descend à l'arrêt suivant. Et pour cause, les deux hommes du groupe sont inscrits pour prendre part aux fesses-tivités. J'aurais volontiers participé seins à l'air, mais l'accès n'est pas autorisé aux femmes. Quelle déception.

 

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Le festival se déroule ainsi. Chaque communauté forme sa propre équipe d'une trentaine d'individus. Même entreprise, même club sportifs, anciens amis d'université... Le tout c'est c'être suffisamment de fesses bras pour la suite des opérations.

 

Tous les participants de notre équipe se changent dans un temple voisin, avant un gros débriefing sur la marche à suivre par les anciens. Une fois nos guerriers la croupe à l'air dans leur fundôshi, sorte de pagne en coton serré et très inconfortable si l'on en croît leur démarche de cowboy, que la fête commence.

 

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À partir de ce moment-là, ce n'est plus le froid qui nous met le rouge aux joues. Il faut être honnête; autant d'hommes  à demi-nus en plein mois de février, éclairés par le soleil timide de midi, les mécaniques tendues par le froid, gonflés de testostérone, ça a de quoi faire tourner la tête. Que les dieux du stade se rhabillent, on a trouvé mieux.

 

Tout d’abord, ils enroulent autour de trois longues perches en bambou d'une dizaine de mètres, une corde faite de morceaux de tissus noués sur lesquels sont écris des prières. Il faut serrer un maximum, pour assurer la solidité du mat obtenu. Les chants d'encouragements, buées de force brute dans le vent glacé, sont ponctués de rasades de saké pour oublier qu'on à froid.

 

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Puis le groupe rejoint le cortège dans les rues balisées où défilent déjà les autres participants. L'ambiance est à son comble, la clameur provient de chaque rue, la foule est en délire, les magasins distribuent de l'alcool à volonté aux troupes. Il y a des jeunes, des vieux, des musclés, des bronzé et des tatoués. Certains groupes de porteurs ne sont constitués que d'hommes de la mafia, dont les tatouages "irezumi" exposé au grand jour font détourner les yeux de la foule. Pour ma part, je suis fascinée. Les mats sont dressés et les participants les plus courageux peuvent grimper le plus haut possible.

 

Braves malgré le froid qui les fait trembler et bleuis leur lèvres, ils sautent, tournent, boivent du saké, crient, ondulent, courent, tourbillonnent, grimpent, s'enivrent, hurlent à perdre haleine. La foule électrisée les acclame. L'alcool, avalé comme on boit la tasse, court dans les veines des corps engourdis. Le soleil apathique n'est bientôt plus qu'un mauvais souvenir. 

 

Notre groupe arrive enfin au temple sous les applaudissements.

 

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Nous rejoignons une petite maison de retraite, où les guerriers soûls font partager leur liesse aux pensionnaires, visiblement ravis d’avoir affaire aux hommes à demi-nu. Sur chemins du retour au bus de notre équipe, nous croisons la police ainsi que deux hommes menottés, le corps couvert de tatouages, le visage en sang. Pas de repos pour les gangs.

 

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Mais rien n'est encore fini. Le vent s’est relevé, et la température descend lentement vers le zéro. Les guerriers qui tiennent encore debout et sont assez brave pour ressortir dans le froid du soleil couchant sont appelés à la deuxième partie du festival : La course de l’Elu.

 

Chaque année, un individu est désigné par le temple celons des critères précis comme étant l'homme chanceux. Tous les participants du festival sont conviés à une course dont le but est de toucher l'élu avant qu'il ne rejoigne le sanctuaire afin de recevoir de la bonne fortune pour l'année à venir. Il est demandé aux hommes à la mauvaise condition physique ainsi qu'aux vieillards de ne pas prendre part à la course, très dangereuse. Il y a un kilomètre à parcourir en ligne droite dans une mêlée digne d'un premier jour de soldes a -70% chez Louis Vuitton. Un grand-père me raconte qu'il y a cinq ans, l'Elu a trouvé la mort par asphyxie dans la lutte.

 

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Le départ est donné, et c'est la débandade. Des milliers de corps se pressent, se bousculent, s'entrechoquent, se repoussent. Des passeurs aspergent la mêlée d'eau froide tandis que l’homme à la bonne fortune avance mètres par mètres en jouant des coudes. Les hommes qui ont eu la chance de le toucher distribuent des lambeaux du tissu de leurs brassards à la foule, comme porte bonheur.

 

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L'effort intense se poursuit durant presque une heure avant que le saint ne rejoigne le temple. Le festival est fini.

La nuit est tombée, les rues se vident aussi vite qu'une vague qui retourne à la mer. J'ai passé une journée fantastique.

 

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D'un seul coup, le miroir se brise.

Des fringants mâles exhalant la force brute, portés par les acclamations de la foule, ne reste qu'une bande hommes usés et ivres, titubant sur les pelouses piétinées et boueuses. Je prête mon portable à un guerrier avec une seule chaussure qui appelle sa femme en bredouillant pour qu'elle vienne le chercher.

 

De retour chez moi, j’entre avec délice dans un bain fumant lorsque mon téléphone sonne. Dégoulinante de shampoing sur mon parquet, je décroche. Mon patron me demande où je suis, car les assiettes refusent de se laver toutes seules.

 

 M#&@%. La journée continue.

 

 

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penis festival japan

 

Trois semaines plus tard, je remets ça.

 

Le 15 mars 2013, rendez-vous à Komaki, 20km au nord de Nagoya. Ici, au temple Tagata se déroule chaque année le festival Hônen, des récoltes et de la fertilité, autrement nommé le festival du pénis.

 

Premier constat arrivé à la gare : L'endroit est plein d'étrangers, et de personnes âgées. Vendredi matin oblige, les jeunes sont tous au travail.

La bourgade déborde d'objets phalliques ou vaginaux. Sculptures, drapeaux, entremets ou bonbons... Le produit qui se vend le plus, se sont les bananes au chocolat, avec chamallow en gise de bourses. Ce serait à la limite de l'obscène si ce n'était pas vendu par des mères de familles et des mamies tout-sourire en manteau rose.

 

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Le public se précipite au temple afin de poser la main sur tout un tas d'objet. Poteau, rochers, cloches, idoles, tous surmonté de glands.

 

La parade voit défiler des prêtresses serrant pieusement d'énormes verges en bois, ainsi qu'un char portant un pénis de plusieurs mètres de long. En fin de course, le char entre tout entier dans un temple minuscule, et je vous épargnerais les comparaisons douteuses qui sont bien sûres complètement voulues par l'organisation du festival.

 

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Le public de précipite ensuite au lancé de mochi.

C'est un gâteau dur de farine de riz qui ramolli lorsqu'on le fait chauffer. Moi j'adore ça, surtout dans une soupe de haricot rouge sucré, le Zenzaï. 

 

Autour de moi, c'est la cohue. La foule ultra compacte m'empêche de bouger, et je me sens ballotée comme une algue dans un courant marin. L'exaltation du rattraper de mochi m'empêche de penser au danger que représente une telle cohue pour ceux qui se baissent ramasser les gâteaux tombés à terre. Une fois baissé, impossible de se relever, c'est le piétinement qui nous pend au nez. Mais je reste bien debout, les coudes contre les côtes, ne sautant en experte de volley-ball qu’aux moments critiques.

Je réussi à en attraper trois au vol dont un au milieu du front qui me sonne quelques secondes. C'est dur ces trucs là et ça pèse bien 200 grammes. Mais je m'en sort plutôt bien puisque qu'à a fin, une amie a une belle giffure en plein milieu des sourcils, et un autre, l'oeil poché.

 

Beau combat soldats du mochi volant.

 

 

Le festival est terminé, et je rentre parmi les premiers, car vendredi oblige, ce soir je travaille au restaurant français. J’ai une bosse sur le front, je me lèverais à 5H30 demain matin, un samedi chargé de travail à la boulangerie, passerais le reste de l’après-midi sur les dernières révisions pour le TOEIC, mon réveil sonnera de nouveau à 5h30 dimanche, et je filerais à la maison des examens à midi pour passer mon test, puis mon sac sur le dos, je prendrais le bus pour deux jours à Kyoto.

 

Maintenant, il faut que je trouve où caser une sieste.

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